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La Bible

le mercredi 6 octobre 2004

par Odon Vallet
Professeur d’Histoire des Religions à la Sorbonne 

Première partie : Qu’est-ce que la Bible ?

Le mot " Bible "

C’est un mot piège, car on dit " la " Bible, alors qu’il faudrait dire " les " Bibles, en grec "Ta Biblia" est un pluriel. L’équivalent hébreu, " Ha-sefarim " est aussi un mot pluriel. La Bible n’est donc pas un livre mais une bibliothèque, un ensemble de livres qui ont été réunis mais dont les sujets mêmes sont très, très différents. C’est donc une erreur de parler de religion du livre. 
D’abord parce que c’est une religion " des livres " qui compose la Bible, et ensuite, bien entendu, si on classe sous le nom de " religions du livre " des musulmans, des chrétiens, des juifs, ils ne se réfèrent pas au même livre sacré.

Pour qui la Bible est-elle un texte sacré ?

 

La Bible est un livre sacré pour les Juifs, qui sont dans le monde 14 millions à peu près, et pour les Chrétiens, qui sont environ 1 milliard 900 millions dans le monde. Cependant, pour les Juifs, sont sacrés les livres de la Bible qui sont antérieurs à Jésus-Christ. 
Alors que, sous le nom " Bible ", les Chrétiens réunissent les livres antérieurs à Jésus-Christ, qu’ils nomment " Ancien Testament ", et ils y ajoutent les livres postérieurs à Jésus-Christ, qu’ils appellent " Nouveau Testament ".

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L'Ancien Testament, Zacharie, Dieu et Adam (Michel-Ange)

En d’autres termes, la Bible des Chrétiens, c’est celle des Juifs, plus " Le nouveau Testament ".

L’idée pour les Chrétiens de considérer comme sacrés les livres antérieurs à Jésus-Christ a fait longtemps débat. 
Au 2ème siècle, il y eut ce qu’on appelle " L’hérésie de Marcion ", théologien pour lequel tous les livres antérieurs à Jésus-Christ n’avaient pas de valeur. 
Seul comptait " Le Nouveau Testament ", et encore dans celui-ci ne comptaient que les livres les moins juifs et les plus grecs, c’est-à-dire essentiellement " L’évangile de Luc " et la plupart des "Epîtres de Paul". 

Dans cette " Hérésie de Marcion ", on a déjà les prémices d’un anti-judaïsme, selon lequel les Chrétiens ne pourraient pas reconnaître comme sacré, comme révélation, ce qui est antérieur à Jésus-Christ. L’inverse de Marcion, ce sont les Chrétiens Ethiopiens monophysites qui estiment être à la fois les fils et les filles de la première Alliance, celle d’Abraham, et ceux de la seconde Alliance, celle de Jésus-Christ, c’est pourquoi ils sont circoncis.


LE TALMUD

Dans ce contexte, il nous paraît relativement simple de dire que, pour les Chrétiens, la Bible, c’est l’Ancien Testament plus le Nouveau Testament. 
Mais le Judaïsme a un autre livre vénérable, sinon sacré, qui est le "Talmud". Or, le Talmud n’est en rien un ouvrage sacré ni même vénérable pour les Chrétiens.
Donc le seul noyau commun aux Chrétiens et aux Juifs est l’Ancien Testament.

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Le Talmud

Ce Talmud, qui veut dire " étude " en hébreu, est un livre qui existe sous deux versions : le " Talmud de Jérusalem " qui a été écrit sur les bords du lac de Tibériade vers le 4ème siècle, et le "Talmud de Babylone ", écrit environ un siècle plus tard. 

Pourquoi ce Talmud ?
Parce que le temple de Jérusalem ayant été détruit en 70 après Jésus-Christ, la population juive de Palestine ayant été dispersée à partir de 135 environ après Jésus-Christ dans une grande diaspora, les traditions menaçaient de se perdre. 
Or, la Bible est un ensemble de livres. Peut-on dire qu’un ensemble de livres contient toute une foi, tout un dogme, toute une morale, toute une Loi ? C’est discutable car un livre se commente, et parce que, au-delà de l’écrit, il peut y avoir l’oral. C’est pourquoi le Talmud a recensé tout ce qui relevait de la loi orale, la " Halaka ", et aussi tout ce qui relevait de l’étude de la Halakha, la "Michna ", et de l’interprétation de cette Halaka, la " Midrach ".

En d’autres termes, on peut dire que, au-delà de la loi écrite de la Bible, il y aurait en plus une loi orale, et enfin un commentaire sur la loi. D’ailleurs, le Talmud est probablement l’un des premiers livres dialectiques du Proche-Orient, puisqu’on y voit souvent des discussions entre rabbins sur la Loi.

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Ceci n’est pas tout à fait unique dans les livres sacrés des religions. Il y a d’autres religions dans lesquelles il y a à la fois un livre sacré et ensuite des commentaires sur ce livre sacré. 

Nous le verrons à propos du Bouddhisme où, dans la triple corbeille sacré, " Tripitaka ", il y a les sermons du Bouddha, (les " sutras ", la parole qui serait sortie de la bouche du Bouddha historique), et il y a aussi l’ " Abhidharma ", qui est le commentaire sur cette parole et les préceptes que l’on peut en tirer sur un plan moral.

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Tripitaka

Nous verrons également, à propos de l’Islam, que pour les Musulmans, il y a le Coran qui est la parole de Dieu même, mais il y aussi les " hadiths ", qui sont les propos prêtés au prophète pour commenter ou compléter cette parole. 
Par exemple, le célèbre interdit de l’image dans l’Islam ne figure pas dans le Coran, mais seulement dans les hadiths. 
En Jordanie, dans les châteaux du désert, il y a de magnifiques peintures, dont certaines représentent des femmes dévêtues, qui datent du 7ème siècle, avant même les hadiths.

On peut remarquer que les commentaires sur les livres sacrés sont toujours plus ou moins pluriels. Il y a une dialectique des rabbins, les discussions entre rabbins qui fondent d’ailleurs les différents courants du Judaïsme, il y a une divergence sur les hadiths, tous les Musulmans ne sont pas d’accord sur les commentaires faits à propos du Coran, et il y a une grande diversité dans l’Abhidharma bouddhique, et ces livres ne sont d’ailleurs pas tous révérés ou respectés par l’ensemble des bouddhistes, selon les différentes écoles du Bouddhisme.

Pour nous résumer, la Bible c’est les Bibles. Cela concerne deux religions différentes : le Judaïsme et le Christianisme, ce n’est pas tout à fait la même Bible. Pour le Judaïsme, il n’y a pas que la Bible, alors que pour les Chrétiens, il n’y a que la Bible de sacré en tant que livre.

Deuxième partie : Que contient la Bible ?

Là encore, c’est une source de désaccords constants. Si vous lisez une bible, il y manque des livres que l’on trouve dans les bibles catholiques, par exemple dans la " Bible de Jérusalem " ou dans la
" Bible œcuménique ". 

C’est la question des " deutérocanoniques ". " Deutéro " veut dire " deuxième ", c’est donc le deuxième canon. 
Il y a un certain nombre de livres que les catholiques considèrent comme faisant partie de la révélation, mais que ni les protestants, ni les juifs ne considèrent comme en faisant partie. Les juifs, parce que la quasi la totalité des livres ont été rédigés en grec et non en hébreu. Les protestants, pour d’autres raisons, qui tiennent au fait que ces livres sont généralement plus tardifs.

Il ne faut pas non plus exagérer cette divergence. À défaut de les considérer comme sacrés, les juifs comme les protestants seront d’accord pour considérer que ces deutérocanoniques peuvent comporter de très intéressants enseignements.

Par exemple, ils comprennent des livres comme " Judith ", " Tobie ", " La Sagesse ", petit proverbe, le " Siracide ", livre de sagesse ecclésiastique, et également des livres comme ceux des 
" Maccabées ", très importants pour suivre l’histoire du judaïsme antique. 
Cependant, ce sont des livres un peu tardifs qui figurent dans la traduction grecque de la Bible hébraïque, ce qu’on appelle " les septantes ", et donc " La Septante " a incorporé certains de ces livres qui ne se trouvaient pas dans la Bible hébraïque.

Cette Septante a été rédigée au 3ème siècle avant Jésus-Christ. 
On l’appelle " septante " parce que 70 ou 72 traducteurs l’auraient rédigée, paraît-il, en 72 jours, ce qui semble impossible, mais l’important est que ces livres deutérocanoniques et cette septante concernent une époque postérieure à l’arrivée d’Alexandre Le Grand.

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Ce qui a bouleversé le Proche-Orient antique, c’est qu’Alexandre Le Grand, qui n’a dirigé son empire que pendant un ou deux ans, vaincu par la malaria après son expédition en Inde, a complètement chamboulé la carte géopolitique. Ses successeurs, ses lieutenants, ont fondé des royaumes hellénistiques, et le Proche-Orient s’est, en partie, converti à la culture grecque.

Ceci nous amène à la question des langues. 
Pour les juifs, il est évident que seul le texte hébraïque fait foi. Les protestants ont toujours accordé une grande importance aux textes, aux livres, à l’écriture, mais ils n’en font pas une question déterminante, et ils accordent un grand crédit à la Bible hébraïque comme à la Bible grecque.

Pour les catholiques, c’est un peu plus délicat. La tradition catholique s’est toujours référée à la version grecque des septantes et, surtout à la version latine de saint Jérôme, " La Vulgate ", même si saint Jérôme s’était aussi référé au texte hébreu.

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Saint Jérôme (Caravage)

Ce qui signifie que, jusqu’au 16ème siècle, la tradition catholique ignorait à peu près tout de la Bible hébraïque.


Puis est arrivé un grand homme qui s’appelle François 1er.

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François 1er (par Clouet)

François 1er est très connu pour son " Ordonnance de Villers-Cotterêts " qui a fait du Français la langue officielle du pays. Mais il a aussi créé un "Collège des Trois Langues" : hébreu, grec et latin. 

À partir de François 1er, les études d’hébreu ont commencé à prospérer en France. C’était la Renaissance. On s’est remis à la découverte de l’Antiquité, et notamment de l’antiquité hébraïque. Par la suite, le catholicisme s’est pleinement référé au texte de la Bible hébraïque et, depuis longtemps, à l’Institut Catholique de Paris, il y a des professeurs d’hébreu. On étudie le texte hébraïque autant que le grec.
Ces controverses relèvent donc plus de l’Histoire que de l’actualité.

De la même façon, si on regarde la division de la Bible en livres, les sutures, les débuts et fins de livres, le nom même des livres, ne sont pas identiques chez les chrétiens et chez les juifs, mais ça ne concerne qu’une méthode de découpage et non le texte lui-même.

Peut-on tenter de classer, de grouper ce texte ? C’est très difficile puisque la Bible est une bibliothèque comportant des ouvrages très différents mis à la suite les uns des autres. Tous les bibliothécaires savent bien combien il est difficile d’avoir une méthode de classement simple, juste et fiable. 

On peut estimer que la solution la moins mauvaise a consisté à regrouper les livres de la Bible en trois parties : la première concerne la Loi, la deuxième les Prophètes, et la troisième tout le reste. On appelle cette troisième partie " Les Écrits ", ce qui évidemment n’engage à rien.

LA LOI

" Le livre de la Loi ", qu’on appelle souvent le " Pentateuque ", parce qu’il y en a cinq (Genèse, Exode, Lévitique, Nombres, Deutéronome), mais que les juifs préfèrent appeler la "Torah", c’est-à-dire la Directive, ou la Direction. 
Ce livre est pour eux la base du livre sacré, probablement ce qu’il y a de plus sacré dans le sacré : la Loi.
Alors que les chrétiens auraient tendance à considérer que la valeur des Prophètes et celle des Écrits, y compris peut-être des auteurs un peu secondaires, n’est pas inférieure à l’autorité sacrée de la Torah.

Qu’est-ce que cette Torah ?

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La Torah

On peut dire que c’est la loi pour le peuple d’Israël, pour tout le peuple et seulement pour le peuple. Ceci est intéressant. C’est la loi pour tout le peuple, avec la question des immigrés. Etaient-ils ou non soumis à la loi, à la circoncision, etc... ? Mais c’est tout le peuple. Petits, grands, riches, pauvres, tout le monde est soumis à la même loi.

Ce qui est évidemment très différent, par exemple, des textes hindouistes qui créent des devoirs différents selon les castes : brahmanes, guerriers (" kshatriya "), commerçants (" vaishysa"), etc…

Ce qui est fondamental dans la Loi d’Israël, c’est qu’elle est la même pour tous : petits, grands, pauvres, riches. Ce qui en soi est relativement démocratique, d’ailleurs. Mais cette loi vaut seulement pour le peuple d’Israël et pas pour les autres. En d’autres termes, les non juifs ne sont pas soumis à la loi d’Israël. 
Ce qui est très important car, si on prend les commandements des chrétiens, ce sont les mêmes pour tous. Tout le monde doit suivre les mêmes commandements. Les commandements ne sont pas destinés à un peuple, mais à tous les peuples, " orbis terrarum ".

Il faudrait nuancer un peu car il y avait des règles de pureté rituelles qui s’appliquaient seulement aux prêtres, les Lévites, mais pour le reste, les éléments de la Loi, les 613 Commandements, ou " mitzvoth ", s’appliquent à tous.

Cette loi, ou ces lois, sont gravées par écrit sur des tables. Nous sommes dans des sociétés de l’écrit. 

À ce sujet, la Torah juive, comme d’ailleurs la Charia musulmane, s’inscrivent dans une tradition trimillénaire de lois issues de Mésopotamie.
Ces lois s’inspirent parfois de textes qui remontent donc au troisième millénaire avant Jésus-Christ. 
Les " lois d’Ur Nammu " doivent dater de 2200 avant Jésus-Christ. 
Il y a des éléments d’ordre pénal, comme la lapidation, l’amputation, qu’on retrouve dans la Charia, dans la Torah et aussi dans les lois mésopotamiennes. 

Pour prendre un exemple très simple, le fameux " Sabbath ", le repos du 7ème jour, remonte à une tradition mésopotamienne. Ce sont les astronomes mésopotamiens qui ont inventé la semaine de sept jours, et chez les Mésopotamiens, le 7ème jour était un jour néfaste où il fallait se reposer de peur de faire des bêtises. Les juifs lui ont donné un nouveau sens, le jour du repos, non pas pour éviter de faire des bêtises, mais en souvenir de la création en six jours après laquelle Dieu se reposa le septième jour.

Voilà un exemple d’emprunt que fait la Torah à l’antique loi mésopotamienne.

Cette loi biblique est-elle éternelle ? Vaste problème. En principe, Dieu c’est l’Éternel. Aujourd’hui dans notre Droit profane français, nous disons " Les lois disposent pour l’éternité ". 
Tant qu’une loi n’est pas modifiée, elle est toujours en vigueur. Même si dans la pratique, on les change assez souvent. On a dû changer 16 à 17 fois de règles pour l’immigration, mais, en principe, la loi dispose pour l’éternité.

Ce n’est pas toujours le cas pour les Etats-Unis où il y a des lois temporaires. En Californie, par exemple, on peut voter une loi pour dix ans. Mais en France, une loi est votée pour l’éternité.

Or, en lisant attentivement la Bible, on peut affirmer que ces lois ont évolué.

Prenons le livre du " Deutéronome ", le cinquième du Pentateuque, chapitre 5, verset 9 : " Je suis un Dieu jaloux qui poursuit la faute des pères chez les fils sur trois et quatre générations ". L’arrière-grand-père a fauté, l’arrière-petit-fils sera puni. C’est le châtiment héréditaire.

Vous prenez le même livre du Deutéronome, chapitre 24, verset 16, et on lit : " Les pères ne seront pas mis à mort pour les fautes des fils, ni les fils pour les fautes des pères. Chacun sera mis à mort pour son propre pêché ". C’est donc la responsabilité individuelle.

Deux textes contradictoires dans un même livre. 
En général, on en déduit que le deuxième est plus indulgent et qu’il est probablement postérieur. Ce qui signifie en clair, et ceci peut être vérifié par un détour via les lois assyriennes, qu’il y eût une époque où le droit pénal était héréditaire - on châtiait les familles entières des condamnées -, puis qu’il y eût une époque où on a pratiqué le principe de la responsabilité individuelle. En droit français, la mort éteint les poursuites.

Ce qui signifie bien qu’il y a dans un même livre des textes ou des fragments de textes séparés par plusieurs siècles, et plusieurs rédacteurs échelonnés dans le temps.

Mais alors, me direz-vous, qui a écrit ça ? 
Pendant longtemps, on a dit Moïse a écrit seul la Torah. Un seul écrivain qui aurait reçu la parole de Dieu et qui, en quelques années aurait écrit la Loi de Dieu.

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Moïse

Puis, on a vu qu’il y avait des textes contradictoires. Manifestement, il y avait aussi des styles un peu différents qui révélaient des couches rédactionnelles différentes. C’est exactement comme, lorsqu’on fait des fouilles archéologiques, on va retrouver des bâtiments de styles différents.

Au 17ème siècle, un théologien catholique, un prêtre, Richard Simon, rédigea une " Histoire critique du Vieux Testament ". Il a affirmé : " Moïse n’a pas écrit seul le Pentateuque, les cinq livres de la Loi ". 

Ce fut une révolution. Et Bossuet, l’évêque de Meaux, a ordonné qu’on brûle le livre de Richard Simon comme hérétique car il se disait : " Si on affirme qu’il y a eut plusieurs rédacteurs d’époques différentes pour la Loi de Dieu, c’est peut-être que cette loi variable n’est pas une loi inflexible. Et pourquoi pas ? Ce serait une loi qui aurait varié en fonction de préoccupations humaines, donc ce ne serait plus une loi divine et cela serait dangereux. Il ne faut pas que les croyants s’attachent à cela, ça sèmerait le doute ". 

Bossuet a donc ordonné qu’on brûle ce livre. On n’en a plus parlé pendant un siècle, on en a reparlé au 18ème, puis au 19ème siècle, surtout en Allemagne.

Aujourd’hui, on pense, mais il faut être là extrêmement prudent, qu’il y a eu plusieurs traditions différentes. Classiquement, on regroupait ces traditions en quatre parties.

L’une qu’on appelle " la source J ", car elle appelle Dieu, Jahvé. Ce serait la plus ancienne, et c’est notamment la source du deuxième récit de la création, celui du paradis terrestre avec Adam et Eve.

La deuxième qu’on appelle " E ", parce qu’on appelle Dieu " Elohim ". Ce serait une source un peu différente. La source " J " viendrait peut-être plus du sud, de Jérusalem, alors que la source "E " viendrait peut-être plus du nord du pays.

La troisième source qu’on appelle " Sacerdotale " ou " P ", qui serait également une source proche du temps des milieux sacerdotaux de Jérusalem, est notamment la source du premier récit de la création, 
" Le poème de la création en six jours ".

Enfin, une quatrième source, " Le Deutéronome ".

Mais cela est vraiment assez schématique et, aujourd’hui on aurait tendance à dire qu’il y a plusieurs traditions ou groupes de traditions qui ont composé " La Bible " à des époques différentes.

Mais alors à quelle époque ? 

Immense sujet de controverse. Certains disent " à partir du 10ème siècle avant Jésus-Christ jusqu’au 4ème ou 3ème siècles avant Jésus-Christ ". D’autres, plus récemment, on dit que cela ne remontait pas au-delà du 7ème siècle avant Jésus-Christ. 
La seule probabilité, quasi certitude, c’est que, durant l’épreuve de l’exil à Babylone, le peuple juif a été amené à recomposer ses textes écrits, sa Bible, en fonction de l’épreuve subie. Pour répondre à de nouveaux défis, il a fallu de nouveaux livres. Car la Loi s’incarne dans l’Histoire et dans la Géographie.

Dans l’Histoire, on peut penser au récit de l’exode d’Egypte. Dans la Géographie, on peut penser aux pérégrinations du nomade Abraham. Un peuple se sédentarise et abandonne ses multiples divinités pour un seul dieu, un seul temple et un seul état, c’est à peu près le résumé de cette Loi, qui n’est pas uniquement juridique, puisqu’elle comporte des éléments qui se veulent historiques (la sortie d’Egypte), des éléments qui se veulent géographiques (la nomadisation d’Abraham).

LES PROPHÈTES

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Là encore, il faut être extrêmement prudent. Comme la Torah, les livres prophétiques sont des textes successifs, rédigés à des époques différentes, mis parfois bout à bout, mais parfois remaniés. 

Par exemple, chacun connaît le prophète Isaïe. On a montré depuis 150 ans qu’il y avait au moins deux Isaïe. Maintenant, on pense qu’il y en a trois. Donc, en réalité, sous le nom d’Isaïe, il y a trois époques de rédactions différentes qui se réclament de la tradition d’Isaïe, ou de l’école d’Isaïe.

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Isaïe

Un peu comme en peinture où, autrefois, on se réclamait de l’époque et de l’école de Rembrandt ou de Rubens, mais le tableau n’était pas forcément de Rembrandt ou de Rubens. C’est un peu pareil.

Ce mot de prophète mérite une explication. En grec, " prophètès ", c’est celui qui annonce, et qui annonce des malheurs. Tout prophète est prophète de malheur. Il annonce au peuple que des malheurs vont arriver parce que le peuple s’est écarté de la Loi. Le prophète ne s’oppose pas à la Loi. En général, on dit d’un prophète que c’est un doux mystique, quelqu’un qui est un peu tête en l’air. Au contraire, le prophète fait un rappel à la Loi. " Shema Israël " (" Ecoute Israël, et reviens à la Loi de tes Pères "). C’est très dur.

Par exemple, le prophète Osée compare Israël à une grande prostituée. " Il t’arrive des malheurs. Tu te prostitues aux modes du monde, tu cèdes à toutes les tentations. Reviens à la Loi ".

Isaïe dénonce le matérialisme ambiant : " Ils ont ajouté champ à champ, propriété à propriété ". Voilà la source des malheurs. C’est l’accumulation des richesses dans les mains de quelques uns. Revenons à la vie de justice sociale de nos Pères.

Le prophète est donc souvent un homme du peuple, et cet homme du peuple va interpeller le pouvoir royal. Mais ce n’est pas le fou du roi. Ce n’est pas un homme de cour, au contraire. Il interpelle le pouvoir royal, qu’il critique comme étant infidèle à la loi de Dieu.

Et ceci a une conséquence très importante. C’est que, pour Israël, le pouvoir royal n’est pas divinisé. On peut et on doit, parfois, critiquer le roi. En général, on pense que les prophètes ont attendu la mort du roi pour le critiquer. Mais il est critiqué, ce qui est fondamentalement très diffèrent des rois-prêtres mésopotamiens, qui avaient à la fois le pouvoir civil et le pouvoir sacré, et des rois-dieux égyptiens, les Pharaons.

À Jérusalem, il n’y avait pas de temple au palais, mais il y avait un temple et un palais distincts. À cet égard, le pouvoir contestataire des prophètes introduit une " relative " séparation entre le pouvoir profane et le pouvoir sacré.

Le mot hébreu pour prophètes est " neviim ". 
Pour comprendre ce mot, il faut faire un petit détour par la grammaire. " Neviim " vient d’un verbe hébreu qui n’est pas utilisé à l’actif, mais au passif et au moyen. Vous savez que, chez nous, on n’a plus que l’actif et le passif, mais en latin, en grec et en hébreu, on avait une voie intermédiaire entre l’actif et le passif. En latin, on appelle ça le " déponent ", en grec, " le moyen " et en hébreu le " hithpael ".

Prenons le verbe " parler " en latin : " loqui " (loquor à la première personne) qui a donné " loquace " en français. " Loqui " n’est pas un actif, c’est un déponent. 
Ce qui veut dire que, en latin, " loqui " ne signifie pas " parler à quelqu’un ", c’est " parler à soi-même et à quelqu’un ". C’est se parler à soi pour parler à quelqu’un. C’est-à-dire que celui qui parle se parle à lui-même, dans une sorte de méditation intérieure, ou reçoit une parole d’un autre et, à partir de là, il peut parler. 

Or, le prophète de la Bible, c’est ça. C’est celui qui médite, qui réfléchit aux malheurs du monde et, surtout, aux malheurs d’Israël. Celui qui va recevoir une parole de Dieu qui lui dit " Va dire cela à ton peuple ". Et qui, à ce moment là, va aller parler aux autres.

Mais la parole du prophète n’est pas seulement une parole active. Ce n’est pas uniquement une parole donnée, c’est une parole reçue et une parole méditée. Le prophète se parle à lui-même et nous parle. Il se parle à lui-même inspiré par Dieu. Donc, le prophète est une sorte de lien entre Dieu et le peuple. Il redit et il se redit ce qui fait son identité juive et celle de son peuple, et dit au peuple les risques qu’il court en perdant son identité et sa fidélité à Dieu et aux Pères, au Dieu de nos pères.

L’ennemi est donc à la fois la nouveauté et l’étranger. Et plus encore l’étrangère, la femme tentatrice qui risque de faire perdre la fidélité à Dieu et aux Pères. Quant à la nouveauté, elle est dangereuse, puisqu’elle risque d’altérer la fidélité.

En ce sens on peut dire que les prophètes sont réactionnaires et révolutionnaires. Ils veulent revenir à la foi des Pères, mais pour revenir à la foi des Pères, il faut une vraie révolution, et souvent une révolution sociale. Nous dirions que les extrêmes se rejoignent.

Les Sages sont plutôt des conservateurs réformateurs, un peu centristes sur les bords. Les Prophètes, eux, sont partisans de changements radicaux, de révolutions, pour revenir à ce qui fait l’identité du peuple d’Israël.

Comment classer ces prophètes ? 
C’est bien difficile. Il y a des petits, il y a des grands. Qu’est-ce que ça veut dire ? En fait, le classement est chronologique. On les classe par date probable ou supposée de rédaction de ces livres. Le premier, le plus grand est Isaïe. C’est le plus long, c’est le plus ancien.

Vous avez Isaïe, Jérémie, Ezéchiel, Osée, Joël, Abdias, Amos, Jonas, Michée, Nahoum, Habacuc, Sophonie, Agée, Zacharie, Malachie. Il faut beaucoup se méfier de ces classements, puisque, dans chaque texte prophétique, il y a des fragments d’époques différentes. Or, comme souvent dans la Bible, c’est le plus petit qui est le plus important.

Si on prend, par exemple, les deux textes les plus souvent cités par " Le Nouveau Testament ", c’est Zacharie et Malachie.

Zacharie dit que " le roi d’Israël s’avance sur un ânon ", c’est les Rameaux. Jésus s’avance sur un ânon à Jérusalem.

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Zacharie (Michel-Ange)

Malachie dit : " Dieu est le soleil de justice, soleil levant sur ceux qui gisent dans la nuit ". C’est l’enfant Jésus.

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Malachie

En réalité, même des petits prophètes considérés comme un peu tardifs, jouent un rôle très important dans le Nouveau Testament, et aussi, apportent un message bref, mais important. D’ailleurs, la tradition juive les a conservés, alors même que, sur le plan des dates, certains sont un peu tardifs pour être considérés sur le même plan que les grands prophètes des siècles antérieurs.

Il ne faut pas chercher une logique à tout prix dans ce discours prophétique. Bien souvent, les prophètes sont contradictoires. On a vu qu’il y avait des passages contradictoires dans la Torah avec la peine héréditaire et, quelques chapitres plus loin, la responsabilité individuelle. C’est rigoureusement pareil chez les prophètes.

Cette phrase en est un exemple : " Martelant leurs épées, ils en feront des charrues, on ne fera plus la guerre ". On trouve cela chez Michée, Ezéchiel et Isaïe.

Lisons maintenant le prophète Joël. C’est le contraire. " De vos charrues, faites des épées ". Ce qui veut dire qu’il faut faire la guerre.

Il y a donc eu des textes écrits pour temps de paix, et un texte écrit pour temps de guerre. Tout dépend des circonstances. On peut donc, par ces contradictions, deviner les circonstances historiques qui ont présidé à l’écriture de ces textes en fonction de l’histoire d’Israël telle que nous la connaissons.

Ces prophètes sont des gens qui vont s’adapter aux nouvelles réalités de l’Histoire, et tenir un discours qui sera fonction des problèmes concrets, pratiques, du peuple d’Israël. Et leur théologie va être modifiée.

En voici un exemple assez frappant. C’est chez le prophète Ezéchiel, chapitres 36 et 37. Ils sont là aussi presque contradictoires. 
Le chapitre 36 nous parle de la restauration matérielle d’Israël. Ezéchiel parle pendant l’exil à Babylone, et il nous dit que " le pays dévasté va redevenir un jardin d’Eden, un paradis ". Il promet au peuple d’Israël déporté à Babylone un paradis terrestre.
Chapitre suivant, 37. C’est ce qu’on appelle " La vision des ossements desséchés ". Dans une vision, Ezéchiel voit les squelettes se recouvrir de muscles, les muscles se recouvrir de peau, les tombeaux s’ouvrir, les hommes et les femmes ressusciter. En d’autres termes, ce qui est promis ce n’est plus le paradis terrestre, c’est la résurrection.

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Ezéchiel (Michel-Ange)

Cette " Vision des ossements desséchés " du chapitre 37 a été reprise par le grand cinéaste Abel Gance dans le film " J’accuse " (il y a eu deux versions, une en 1920, une en 1937). 
Dans ce film, on voit les morts de la guerre de 14, dans les cimetières militaires, sous leurs croix, " les croix de bois " comme aurait dit Roland Dorgelès, se dresser. Brusquement leurs squelettes se recouvrent de muscles et de peau. Ils se lèvent pour aller dire aux vivants : " Plus jamais la guerre ".

Cette vision d’Ezéchiel de la résurrection est un peu contradictoire avec le paradis terrestre. Le bonheur n’est plus dans le relèvement matériel d’Israël. Il est dans un autre monde, dans une autre vie, un autre temps. Cette vision d’Ezéchiel trouvera son plein développement dans le deuxième livre des Macchabées, chapitre 7, verset 9, où au bourreau grec qui le torture, un jeune juif répond : " Tu peux bien m’ôter la vie, mon dieu me ressuscitera ".

On voit donc que cette idée essentielle de la résurrection est née en plusieurs étapes. Une première étape dans le texte d’Ezéchiel correspond à l’exil à Babylone. La deuxième étape correspond aux Maccabées.


Les autres Écrits

Il y a d’autres textes très dissemblables. Ce sont des poèmes liturgiques, comme les psaumes, qu’on appelle " Les psaumes de David ". En fait, ce ne sont pas " Les psaumes de David ", mais " Les psaumes à David ", en hommage au roi David.
C’est de la poésie amoureuse, " Le cantique des cantiques ", attribué au Roi Salomon, ou peut-être conçu pour le roi Salomon. Amour érotique, amour spirituel, chacun donnera son interprétation.

Il y a des livres de sagesse, " Les proverbes ", attribués à Salomon, le " Livre de l’Ecclésiaste ". Curieux, ce " Livre de l’Ecclésiaste ". 
Il est rédigé par un homme de l’assemblée, Qohélet, qui se dit " vivant auprès du roi Salomon ". Or, on sait de source sûre, que " Le livre de l’Ecclésiaste " a été écrit au 3ème siècle avant Jésus-Christ, soit 700 ans après la date supposée de la vie de Salomon. En d’autres termes, c’est un livre dans le style de Salomon, mais ce n’est pas un livre " de " Salomon.

Il y a aussi des livres d’Histoire : " Livres de Josué ", " Livres des Juges ", " Livres des Rois ", 
" Livres de Samuel ". Ces livres retracent toute l’histoire depuis l’arrivée en Terre Promise jusqu’aux grandes catastrophes qui ont marqué la période royale, avec la coupure en deux du royaume et les déportations. Mille ans d’histoire.

Mille ans d’histoire ou mille ans de légende ? C’est tout le problème de la valeur qu’il faut attribuer à ces autres écrits.

Et d’abord, quand commence l’Histoire ? Une lecture littérale fait commencer l’Histoire au commencement du monde. On dit que le monde a commencé il y a 5700 ans, en suivant les généalogies depuis Adam.

Donc, l’Histoire commencerait au chapitre 1 du " Livre de la Genèse ".

Aux États-Unis, certains estiment qu’on ne doit pas enseigner la théorie de Darwin, que le monde a été créé en six jours, et que la femme est sortie de la côte d’Adam. Cela, c’est la lecture la plus littérale.

Pendant longtemps, on a dit que les livres historiques commençaient avec Abraham, chapitre 12 de la Genèse, vers 1800 avant Jésus-Christ.

On se pose beaucoup de questions sur Abraham.

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Abraham

Venant d’Ur en Chaldée, était-il irakien ? Venant d’Ahram à la frontière entre Turquie et Syrie, était-il syrien ? On se pose beaucoup de questions sur les lieux et les dates de la vie d’Abraham. Les choses ne semblant pas extrêmement claires, on s’est dit ensuite que si ce n’était pas Abraham, c’était peut-être Moïse ?

On se pose plein de questions sur Moïse.

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Mont Sinaï

Au début, on disait que Moïse avait dû vivre vers 1500 avant Jésus-Christ, c’est-à-dire avant le pharaon Akhenaton, le fameux inventeur du monothéisme égyptien. Ce qui infirmerait complètement la thèse de Freud selon laquelle Moïse serait un disciple d’Akhenaton.
Ensuite, on a dit que Moïse aurait plutôt vécu 300 ans après Akhenaton. Pour en faire un disciple, cela fait très lointain, mais historiquement il y aurait des possibilités. 
Aujourd’hui, on aurait tendance à dire qu’on ne sait pas au juste ce qui s’est passé, on ne sait pas au juste ce qui a eu lieu. Il s’est passé quelque chose : des mouvements de population, des migrations, un exode, peut-être des exodes, pas forcément par une route, peut-être plusieurs routes (on en a identifié au moins trois possibles), peut-être pas en même temps, mais peut-être sur plusieurs dizaines ou centaines d’années. Comme toute migration humaine, celle-ci s’est peut-être faite sur la durée.

Et David. Qui était David ?

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David triomphant (par Jules Elie Delaunay)

On a quelques raisons de penser qu’il y a dû avoir un chef nommé David. Mais quel était exactement son royaume ? On n’a pas retrouvé la moindre borne. Alors qu’en Mésopotamie, on a retrouvé de nombreuses bornes. Quel était ce grand Israël du Roi David qui allait jusqu’aux portes de Damas ?

C’est une question importante pour la politique internationale d’aujourd’hui, puisque le rêve’ du grand Israël de David est aussi le rêve d’une partie de la classe politique en Israël.

Qui était Salomon ?

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Salomon

Celui qui aurait fait construire le Temple ? Celui qui aurait tué 700 épouses et 300 concubines, nous dit la Bible ? Celui qui était le maître de sagesse ? Celui qui était le gendre du Roi de Tyr, le gendre de Pharaon, l’époux de la Reine de Saba ? 
Qui était la Reine de Saba ? Vous savez que Malraux avait commandé un avion pour aller voir sur place le royaume de la Reine de Saba. Il n’a jamais rien vu.

Il y a manifestement un côté un peu enjolivé. Et pourtant, peut-on dire qu’il n’y a rien d’historique ? 
Prenons l’exemple de Charlemagne. Charlemagne a existé, on peut le prouver, on a même des textes qui font allusion au règne de Charlemagne, comme " Le serment de Strasbourg ". On est sûr qu’il a existé. Tout comme est quasiment sûr que l’histoire de l’épisode de Roncevaux et du rocher fendu par une épée est légendaire. Donc, il y a la fois dans le règne de Charlemagne de l’histoire et de la légende.

Probablement, pour David et Salomon, il y a également de l’histoire et de la légende. Dans quelle proportion ? Le tout historique, c’est le sens littéral. Le tout légendaire, c’est le sens symbolique. 
Où peut-on introduire une coupure entre le légendaire et l’historique, le littéral et le symbolique ? Nous n’en savons rien, et ça dépend à la fois de l’opinion de chacun, des progrès de l’archéologie, des découvertes de l’archéologie et aussi des déceptions nées de certaines découvertes.

CONCLUSION 

En conclusion, je dirai que la Bible comporte de multiples incertitudes qui la rendent passionnante. La Bible, pour reprendre la formule d’Alain Bosquet, c’est " le livre du doute et de la grâce ". 
Pourquoi ce doute ? 
D’abord, parce que les textes que nous possédons sont manifestement extrêmement postérieurs aux premières rédactions. 
Le plus vieux texte hébraïque intégral de la Bible date du début du 10ème siècle après Jésus-Christ. Et il est probable que le début de la rédaction se situe à un millénaire et demi plus tôt. 
Alors curieusement, ce plus vieux texte en hébreu est du 10ème siècle après Jésus-Christ, alors que le plus vieux texte grec, qui est une traduction de l’hébreu, est antérieur puisque le plus vieux textes grecs de la Bible, textes qu’on appelle " ONCIAUX " sont du 4ème siècle. L’un, le " Vaticanus " est conservé à la Bibliothèque du Vatican. L’autre, le " Sinaiticus ", qu’on a retrouvé au monastère Sainte Catherine, en Egypte.

Donc, les textes grecs sont les traductions de l’hébreu, mais les plus vieux textes conservés sont des traductions.
C’est comme pour les textes bouddhiques : les textes chinois sont des traductions des textes sanscrits, mais souvent les textes chinois qu’on a gardés sont plus anciens que les textes en sanscrit.

Mais il y a Qumram.
Depuis la découverte en 1947 des " Manuscrits de la Mer Morte ", on a retrouvé un nombre important de fragments de l’Ancien Testament qui datent du 1er siècle avant Jésus-Christ, et notamment un texte d’Isaïe, qui comporte d’ailleurs un certain nombre de variantes par rapport à nos textes habituels. Mais il ne s’agit pas du texte complet de la Bible.

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Les Manuscrits de la Mer Morte

D’autre part, comme les langues sémitiques, comme l’arabe, l’hébreu ne note que les consonnes. C’est seulement au 9ème siècle après Jésus-Christ que les Massorètes, des savants, ont dans le texte, dit 
" massorétique ", mis des petites aides à la lecture, des petits points, des petits traits, pour essayer de suppléer aux voyelles.

Ce qui veut dire qu’auparavant, il pouvait y avoir une marge d’interprétation dans la vocalisation, et il y a pu avoir un certain nombre de réécritures du texte comportant peut-être des incertitudes d’interprétation.

Pour toutes ces raisons, nous devons être extrêmement prudents quant à l’interprétation à donner au texte de la Bible. La coupure entre le vrai et le faux est toujours beaucoup trop simpliste.

Cela n’a pas empêché la Bible d’être probablement le livre le plus lu du monde, même s’il n’y a aucune statistique fiable. La Bible a été traduite en environ 2000 langues. 

On en aurait vendu environ deux milliards d’exemplaires, en sachant que 90% de ces deux milliards ont été vendus depuis moins de cinquante ans, et que la langue numéro un de la Bible aujourd’hui, ce n’est pas l’hébreu, ce n’est pas le grec, ce n’est pas le latin, c’est l’anglais, et que les premiers éditeurs de la Bible sont les Américains.

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Principaux ouvrages d'Odon Vallet

L’École, Albin Michel (1991)
L’État et le politique, Flammarion (1994)
Femmes et religions, Gallimard (1994)
Les religions dans le monde, Flammarion (1995)
L’Affaire Oscar Wilde, Albin Michel (1995)
Administration et pouvoir, Flammarion (1996)
Le Honteux et le sacré, Albin Michel (1998)
Les grandes religions d’aujourd’hui, Flammarion (1998)
Jésus et Bouddha, Albin Michel (1999)
Qu’est-ce qu’une religion?, Albin Michel (1999)
La Politique, d’où ça vient, Flammarion (2000)
Hymnes au masculin, Mercure de France (2000)
Hymnes à la Terre-Mère, Mercure de France (2000)
Le Cantique des Cantiques, Mercure de France (2000)
Une autre histoire des religions, 6 vol., Gallimard (2000)
Petit Lexique des mots essentiels, Albin Michel (2001)
Petit Lexique des idées fausses sur les religions, Albin Michel, 2002 ; 2008.
L'Évangile des païens, Albin Michel, 2003 ; 2006.
Dieu a changé d'adresse – Propos d'un pharisien libéré, Albin Michel, 2004.
Petit Lexique des guerres de religion d'hier et d'aujourd'hui, Albin Michel, 2004.
Petite grammaire de l'érotisme divin, Albin Michel, 2005.
Petit Lexique des mots essentiels, Albin Michel, 2001 ; 2007.
Dieu n'est pas mort... mais il est un peu malade, 2007.
Dieu et le Village planétaire, 2008.
Les Enfants du miracle – Des milieux les plus défavorisés jusqu'aux bancs des grandes écoles, Albin Michel, 2009.
Dieu et les religions en 101 questions-réponses, Albin Michel, 2012.


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